La semaine dernière nous étions réunis à Orléans, au siège de Pentalog, pour travailler sur notre Mission, pendant trois jours, avec 25 collaborateurs venus de Roumanie, Moldavie, Etats-Unis, Angleterre et France bien sûr. Après avoir admis collectivement la force de notre Vision (« Positive Tech Impact », lire l’article #1), l’idée était de formuler et partager nos attentes quant à la Mission, pour créer un backlog d’actions concrètes pour les trois années à venir. L’objectif était ambitieux en temps de paix, il s’est avéré intense en temps de guerre.
Le jeudi 24 février au matin, tout bascule dans le réel.
Notre petit groupe de travail passe le mercredi 23 février au château de Vaux-le-Vicomte, pour suivre la merveilleuse conférence de Christian Monjou, professeur et conférencier inspirant qui évoque notamment les problématiques managériales à travers l’art et les Jardins d’exception (dont celui de Vaux-le-Vicomte imaginé par Lenôtre pour son client Nicolas Fouquet). Nous vivons tous cette journée comme un moment à part, hors du temps, dans des Jardins aux perspectives enivrantes de complexité, de beauté et de sens politique. Le lendemain matin, la gueule de bois nous redépose très vite dans le présent.
Réunion de crise au petit matin…
Quand j’apprends que la Russie a fait ce mouvement venu d’un autre siècle, mon cœur s’emballe. Il y a dans l’équipe de travail deux moldaves qui se réveillent en apprenant qu’on vient de fermer leur espace aérien. Il y a aussi en Moldavie le centre de production de Chisinau où 272 collaborateurs Pentalog sentent le vent de l’Histoire souffler sur eux et leurs familles. Il y a enfin autour de moi dix roumains dont les regards semblent se perdre dans les souvenirs pas si lointains des bruits de bottes communistes.
9h du matin. À l’heure où nous devions affûter nos post-its et nos paper boards pour plancher sur nos projets à impact positif, je décide d’organiser une réunion de crise de guerre dans mon bureau. Certains sont debout, d’autres assis contre les murs, d’autres sont serrés dans l’ouverture de la porte : tous ont le regard sombre du boxeur qui a pris un coup et doit rapidement se relever.
Nous décidons ensemble de protéger les moldaves, vite.
C’est la première et la seule décision qui compte. Avec les directeurs de centres venus de Brasov, Iasi, Cluj, Bucarest ou encore Chisinau (Moldavie), nous comptons les individus et leurs familles et décidons de louer une centaine d’appartements en Roumanie pour accueillir les collaborateurs qui prendront la route, avec leurs proches. Nous désignons une équipe dédiée à la logistique, aux transports. Nous réaménageons les infrastructures des centres de production pour faciliter le co-working d’urgence. Dans le même temps, je décide d’informer nos clients de la situation en leur expliquant en toute transparence les mesures prises pour les humains et les projets liés. Parallèlement nous créons une page web interne, avec Q&A sur la situation. Et nous informons qu’une visioconférence sera dédiée au personnel moldave à l’heure du déjeuner, où je leur expliquerai ce que nous mettons en place pour eux. En une heure, chacun a pris la mesure de l’événement et des actions à mener pour maintenir entre nous ce lien qui nous unit depuis des années.
Nous travaillons quand même sur notre Mission…
Une fois la réunion terminée et les décisions prises, nous reprenons le cours du séminaire. Pas comme si de rien n’était, au contraire. Comme si tout ce travail de préparation que nous avions fait les mois précédents s’était finalement illustré dans cet instant, ce matin, cette situation. Parmi les cinq piliers de notre Mission d’entreprise, sur lesquels je reviendrai dans le prochain article, le premier et sans doute le plus important est celui du soin apporté à notre communauté. Ce n’est pas un mot en l’air, ni un vœu pieux. L’humain chez Pentalog est une colonne vertébrale depuis la création. Nous avons toujours pris soin de nos équipes, de leur santé, de leur bien-être, de leurs attentes. Évidemment nous n’avons jamais été confrontés à la guerre, on ne prévoit pas des choses pareilles. Mais notre profond attachement aux gens qui travaillent avec nous, où qu’ils soient dans le monde, nous a permis de réagir vite comme chacun l’aurait fait pour un proche en difficulté.
Nos deux collaborateurs moldaves ont été contraints de quitter notre petit groupe de travail. Ils ont repris dès le jeudi matin un avion pour la Roumanie, obligés de finir le voyage en voiture pour traverser la frontière au sol et retrouver leurs proches, comme nous l’aurions tous fait à leur place. La veille, ils visitaient ces jardins majestueux ; le lendemain ils se retrouvent aux limites du chaos. Aujourd’hui ils vont bien, la situation est maîtrisée et nous continuons même de recruter là-bas. La vie continue. La vie doit continuer.
Dans le prochain article, je poursuivrai sur notre vision et notre mission, en espérant que ces temps troublés ne viendront pas une nouvelle fois menacer notre volonté de vouloir changer le monde, en mieux.