Nous sommes plus ou moins nombreux depuis quelques années à nous intéresser régulièrement à l’explosion des nouvelles formes de travail, en particulier le freelancing. On dit que 40% du marché américain serait déjà accaparé par cette nouvelle façon de recruter, plus flexible contractuellement et plus adaptée à la vitesse des mutations technologiques. On parle même de 45 dans les professions à la pointe de la tech et de plus de 50% dans le design des nouveaux usages.
LE MONDE DU CONSEIL NE VA PAS A LA VITESSE D’INTERNET
Freelance tech & digital : un autre mode de prestation intellectuelle
De mon côté, il y a 10 ans que j’ai entrepris une démarche visant à prouver qu’une révolution globale de la manière d’opérer des professions de conseil et de prestations intellectuelles est possible :
- On produit aujourd’hui du conseil totalement différemment d’avant internet.
L’offshore, nearshore ont révolutionné la delivery de masse en mettant la production là où elle est la plus rationnelle économiquement. A l’opposé, le freelancing facilite l’accès à l’expertise fine et momentanée. Là encore, la mondialisation du sourcing est possible.Je ne vais pas concevoir ma stratégie de communication américaine avec une agence parisienne. En revanche, je peux travailler tous les jours à distance et dans un rythme équivalent avec une agence américaine. Même les méthodes de production agiles sont accessibles en offshore. Ce point est bien compris et assimilé par tous maintenant. - En revanche pour ce qui est des ventes, la problématique reste très mal comprise par les industriels historiques du conseil. Ils n’ont pas encore intégré qu’à partir du moment où l’on peut produire du conseil à distance, on doit probablement pouvoir faire la même chose avec sa vente. Cela est paradoxal puisque c’est ce qu’on largement compris des myriades d’offreurs d’outsourcing offshore, produisant des milliards de dollars de services depuis des pays émergents. Ces services, il a bien fallu les vendre avant, et à partir de forces commerciales peu nombreuses et relativement peu expérimentées.C’est encore peu sophistiqué, mais ça vient. C’est en tous cas le pari gagnant que nous faisons nous-mêmes dans nos services de conseil et d’outsourcing, puisque chacun de nos vendeurs délivre un CA supérieur de 3 fois à la moyenne du secteur, en couvrant un périmètre géographique mondial, presque sans bouger d’Orléans, Francfort et NY.
Les acteurs historiques semblent aussi ne pas vouloir considérer le succès insolent des places de marché de freelancers qui produisent une expérience commerciale tractant des flux désormais ahurissants. Il y a longtemps qu’un Upwork génère plus de 1 milliard de dollars de vente de services sur sa plateforme. Là encore, il s’agit d’une vente d’un service de prestation intellectuelle qui vient brutalement disrupter le modèle de Publicis ou d’Accenture !
Avec quelques centaines de milliers de professionnels digitaux dans vos bases et une capacité de création de contenu sérieuses, 4 ou 5 commerciaux judicieusement situés, vous pouvez générer des flux constants dans le conseil de plusieurs dizaines de millions.
- La dernière clé, c’est de pouvoir satisfaire le marché très vite, en identifiant un niveau de compétence et pas un simple profil dans les réseaux professionnels. Pour cela nous avons créé dans le groupe un moteur de testing de compétences digital (marketing et programmation), ayant enrôlé déjà 300 000 personnes, auxquelles il est possible de proposer des jobs ou désormais des missions en Freelance. Ainsi pourvue, en fin de chaîne, l’efficacité des recruteurs est 3 fois plus importante puisque les gens ne passant pas le test hard skills ne sont pas sollicités pour un rendez-vous.
Cette expérimentation qui a été la nôtre ces dernières années nous a appris beaucoup sur l’évolution du marché de la compétence technique. La plupart des clients qui se laissent convaincre par notre approche sont plutôt des innovateurs raisonnant en critères stratégiques. Ils se disent que celui qui détient l’offre compétence technique (skill en anglais), détient la capacité de croissance et d’adaptation dont ils ont besoin dans le cadre de leurs plans. Ils sont très représentatifs d’une nouvelle forme de demande, en provenance de la phénoménale vague des startups dans le monde entier, de même que des nouveaux leaders ou des départements innovation, pas du tout à l’aise avec les référencements et les démarches orientées prix et pas besoins, évoluant à 180° du lean, sans orientation sur le besoin et sans mesure constante de l’efficience. La vente de conseil au kg de viande devrait avoir disparu, et pourtant… Si l’image est encore parlante, c’est qu’elle a toujours du sens.
FREELANCING = FUTUR DU TRAVAIL ?
De leur côté, ceux qui analysent l’évolution du marché du travail progressent eux aussi et ont découvert 2 approches diamétralement opposées du freelancing selon que l’on est un col blanc ou un bleu.
Autant le deuxième peut y trouver une indéniable et variée source de revenus, autant il subit finalement la puissance des plateformes dominantes, Uber en étant l’expression la plus familière à tous. Le couple freelancing/place de marché n’est pas vraiment un choix.
Dans le cas des cols blancs, rien à voir. Les entreprises restent souvent dans le désir d’internaliser des compétences clés, poursuivant un vieux mythe aussi présent en Europe qu’aux US, selon lequel un salarié serait synonyme de propriété intellectuelle et ferait partie des actifs intangibles de l’entreprise. Foutaise ! Un salarié ne vous appartient jamais, et compte tenu du rapport de force dans certains pays, c’est parfois lui qui vous tient. Le seul moyen de fidéliser vraiment un salarié ne tient qu’à des instruments financiers : un salaire vraiment au-dessus du marché, une participation au capital d’une entreprise ayant une stratégie époustouflante. Sinon, le turnover classique de l’IT, c’est plus de 20%, personne ne le reconnaît mais tout le monde le sait.
Dans ces univers de la prestation intellectuelle, en programmation, management des serveurs, conseil en organisation, design des produits et des services, marketing… ils sont de plus en plus nombreux à être tentés par l’aventure libérale. Le calcul est simple, si vous avez des compétences recherchées, vous avez intérêt à rechercher les projets les plus adaptés à vos skills, ceux qui les valoriseront le plus, au propre, comme au figuré. Le contrat de travail n’est pas dans ce cas perçu comme un facteur d’atténuation du risque mais comme une assurance inutile dans un environnement florissant. Les perspectives de rémunération et de liberté d’organisation sont bien plus intéressantes dans un cadre libéral, faisant donc exploser le taux de recours à cette modalité de travail.
Votre projet avec SkillValue Freelancing
CONVERGENCE ENTRE EVOLUTION DES BESOINS ET CEUX DES TRAVAILLEURS
Cette appétence des travailleurs pour le freelancing devrait séduire les entreprises au lieu de leur faire peur. Car finalement elle leur apporte une relative fluidité dans un marché complexe, en évolution accélérée. Trouver un freelancer n’est pas plus compliqué que de trouver un salarié (ni plus simple d’ailleurs). La compétence se paie, de deux façons, que l’on soit salarié ou freelance : en cash et par la satisfaction de l’accomplissement du projet, pour peu que celui-ci ait du sens.
Investissant personnellement tellement de temps dans l’innovation lean pour les métiers du conseil et de l’outsourcing, en augmentant l’efficacité commerciale, la multi-modalité et l’interopérabilité des services entre eux, le contrat, la mesure de la compétence et son enrôlement, la mesure d’efficacité des processus… je ne pouvais que croiser les problématiques de l’évolution vers le travail libéral. Précisément, j’ai réalisé que nous étions mieux placés que personne pour proposer aux individus et aux entreprises ce dont ils ont besoin.
Pour 1001 raisons, le travail ne va pas se libéraliser à 100%, même dans le web ! En étudiant les motivations et les souhaits des entreprises américaines, on s’aperçoit que la propension au recrutement et à l’outsourcing reste très élevée. 50% des CIO américains pensent augmenter leur recours à l’outsourcing en 2017 et 40% à l’offshore. Même en baisse sensible, ce chiffre reste impressionnant. La première raison qu’ils mentionnent pour expliquer leurs intentions, c’est l’accès à de nouvelles ressources et la flexibilité dans un environnement incertain. Dans ce tableau, la demande pour le freelancing ne vient qu’en troisième position, et très souvent comme un pis-aller.
Pour essayer de simplifier, j’ai essayé de classer en deux groupes les raisons d’outsourcer / recruter / freelancer.
Il y a par exemple des sujets où le freelancing est impossible :
- Besoin d’un contrat structuré, et mesuré en KPIs (outsourcing)
- Besoin d’une sécurité juridique et d’un contrat d’assurance responsabilité civile (outsourcing)
- Besoin de coordination de nombreux individus (malgré les progrès des environnements collaboratifs, on est encore loin du compte). Pour bien faire un projet ensemble, les gens doivent se connaître (surtout s’ils sont jeunes). (outsourcing)
- Externalisation de process chains complexes (outsourcing)
- Product management (salariat)
- Direction de fonction clé (salariat)
- …
Et d’autres pour lesquels il est indispensable, souvent dans l’univers de la créativité ou de l’expertise technologique :
- Graphic design
- Product design
- Développement IT de courte durée à forte expertise
- …
Freelance tech & digital : les bonnes ressources au bon moment
Reste une frange de la demande de freelancing, substitutive à l’emploi et l’outsourcing, celui des entreprises qui ne sont pas encore assez robustes et solides financièrement pour se payer un contrat de service structuré, ou pas assez appétissantes pour recruter. Celles-ci n’ont souvent d’autres choix que d’avoir recours à des freelancers mercenaires avec toutes les difficultés de sélection de la compétence que l’on peut imaginer.
Toute cette analyse va nous amener, je veux dire Pentalog, à une convergence stratégique. Si l’on veut que la plateforme Pentalog atteigne d’une part le niveau d’exhaustivité et d’interopérabilité des services voulu (techno, marketing, RH), mais aussi un volume d’engagements significatif de la part du marché, il va falloir fusionner nos objectifs stratégiques avec cette analyse de l’évolution du monde du travail. Nous commençons donc, avec des moyens modestes, une expérimentation dans le freelancing du secteur digital, croyant que nombreuses sont les startups digitale à rechercher des développeurs et des marketeurs certifiés par un niveau de tests techniques, comme ceux qui composent la communauté SkillValue. Personne ne veut vendre ou acheter du vent. Partir d’une évaluation technique est probablement une base intéressante et mesurée, compatible avec nos valeurs lean, mais que nous compléterons de services de sélection opérée par de vrais profils techniques, des CTO, en fait ayant effectués des dizaines de recrutements, dans le Groupe Pentalog et ailleurs, coordonnés par l’ancien patron des devs d’un bel éditeur français.
Cette volonté d’adresser le marché du freelancing par un niveau de service élevé, pour le compléter là où il pêche, nous conduit à un démarrage prudent. Il faut faire des tests, trouver le niveau d’appui exact dont les clients ont besoin et le délivrer dans la bonne expérience utilisateur. La valeur de la triple proposition (recrutement, freelancing, outsourcing) reste à déterminer. Nous sommes convaincus que ce qui compte, le plus petit dénominateur commun, c’est la qualification technique, le skill, et pas le mode contractuel. En bref qu’il ne devrait pas y avoir des propositions séparées pour vendre des services en freelance, en outsourcing ou pour recruter, mais qu’une plateforme moderne se doit de les proposer toutes, du moment où elle a identifié la bonne compétence.